Malagasy, acceptez-vous d’avoir un Président de la République qui
ait une nationalité étrangère et qui sera le chef suprême de l’armée ?
Rajoelina Métisse a la nationalité française. C’est
maintenant un fait que personne ne songe à nier.
Les débats de ces dernières semaines portaient plutôt sur la perte ou non de la
nationalité malagasy de Rajoelina Métisse.
Et d’éminents juristes ont participé à ces débats, et chacun a donné son point
de vue souvent partisan, sans pourtant parvenir à mettre tout le monde d’accord
avec des arguments juridiques imparables.
Ce débat est-il vraiment le plus important, quant à
l’avenir des Malagasy ?
Il y aura bientôt 4 ans, le pape François foulait le sol malagasy 30 ans après
le pape Jean Paul II. Rajoelina disait
alors dans son adresse au pape "J’ai promis à mes concitoyens de faire
tout ce qui est en mon pouvoir pour qu’ils croient à nouveau au destin de
Madagascar, qu’ils soient fiers de leur terre et de ce qu’ils sont".
Il faut croire que Rajoelina Métisse n’est pas fier d’être Malagasy ni de ce
qu’ils sont, et ne croit pas lui-même à un meilleur avenir pour Madagascar. Raison
pour laquelle il avait donc pris en 2013 la décision de demander la
naturalisation de toute sa famille dès 2013, pendant qu’il était encore chef
d’Etat.
Une telle demande et un tel comportement de la part d’un chef d’Etat sont-ils
moralement et politiquement acceptables ?
Si on faisait aujourd’hui un référendum portant sur cette question, le
"NON" gagnerait haut la main très probablement.
Dans cet extrait du journal officiel français du 21 novembre
2014, sous le nom Rajoelina figure la mention "dép. 99" signifiant
département étranger pour le dépôt d’une demande dans un pays étranger, en
l’occurrence Madagascar.
Figure également la mention "NAT" qui confirme bien qu’il s’agit
d’une première naturalisation par décret et non d’une "affiliation",
comme s’escrimaient à affirmer Mamasosy et Romy Voos. Si c’était une
réintégration, on aurait lu la mention "REI".
En revanche, sous les noms des enfants Rajoelina figure la mention
"EFF" qui veut dire Naturalisation des enfants mineurs par effet
collectif avec leur parent par décret.
Voilà qui clôt définitivement les débats, au moins sur ces points.
Enfin, voilà donc un chef d’Etat en exercice, qui a demandé
la nationalité française pour lui et sa famille, moyennant son acceptation de
ne pas se présenter aux présidentielles de 2013 d’une part, et son immunité
pour les exportations illicites de bois de rose d’autre part.
C’est ainsi qu’agit quelqu’un qui ne pense qu’à assurer ses arrières, sans
aucune considération pour les impacts éventuels sur les intérêts de son pays
d’origine, en l’avenir duquel il ne croit plus.
C’est certes compréhensible et humain, mais inacceptable de la part d’un chef
d’Etat en exercice. Comportement qualifié par certains de "Haute
Trahison", comme le serait un passage à "l’ennemi", d’autant
qu’il s’agit de l’ancien pays colonisateur.
D’aucuns pensent que Rajoelina Métisse aurait dû au moins
s’abstenir de se présenter aux présidentielles de 2018. Et personne n’en aurait
plus parlé, car il serait redevenu un citoyen binational lambda.
Certains Malagasy de la diaspora ont choisi d’ignorer totalement leurs racines
malagasy. C’est leur choix qu’on peut respecter ou pas.
Plus nombreux sont les binationaux qui utilisent leur passeport malagasy
(dommage que leur validité ne soit que de 5 ans, en espérant un changement
prochain) pour rentrer à Madagascar ( économisant ainsi les droits de visa).
Ils utilisent leur passeport français à leur retour en France.
Des Malagasy travaillant à l’étranger sont l’obligation de faire des
déplacements professionnels, ou tout simplement pour des voyages d’agrément, dans
des pays autres que leur pays de résidence. Ils ont fini par se résoudre à
demander leur naturalisation pour pouvoir voyager plus aisément sans avoir à
demander des visas avec un passeport malagasy (tous, nous connaissons les
contraintes, délais, les coûts, les
difficultés d’obtention de visa Schengen).
Leurs cœurs, pour la plupart, penchent plus pour Madagascar. Ils ont gardé des
liens familiaux très serrés, et n’oublient pas le devoir de
"valim-babena". Ceux-là tiennent même souvent à ce qu’on rapatrie
leur corps en cas de décès. Et ceux-là réclament même le droit de vote.
Voilà pour le binational lambda et ses motivations, mais un chef d’Etat n’est
pas un citoyen lambda et une demande nationalité française envoie un message
politique négatif pour la population et ne peut se réduire à de simples
commodités.
Par ailleurs, un candidat aux présidentielles se doit d’être
transparent et ne doit pas mentir par omission aux électeurs. Nombre des
"compagnons de lutte" de la 1ère heure de Rajoelina
Métisse se sont sentis trahis par son silence et ont même affirmé qu’ils
n’auraient jamais donné leur voix à Rajoelina Métisse s’ils avaient su.
Peut-être aurait-il même perdu ces élections présidentielles, s’il en avait
parlé. Et c’est pour cette raison qu’il s’était tu jusqu’ici. Ce silence vaut
trahison pour ses "amis" et il portera à jamais sur sa conscience
cette omission volontaire.
Rajoelina Métisse peut-il encore se porter candidat aux
prochaines présidentielle ?
Si Rajoelina Métisse a perdu sa nationalité malagasy, il ne pourra évidemment
plus se représenter. Ses thuriféraires le craignent tellement, que certains
sont allés jusqu’à inventer de nouvelles notions juridiques telles une loi
tombée d’elle-même en désuétude.
Afin d’enfoncer le clou et de ne prendre aucun risque sur le rejet éventuel de
la candidature de leur poulain, une quinzaine de députés ont déjà préparé une
proposition de loi modifiant le code de nationalité.
Une loi sur mesure pour Rajoelina Métisse! Tout comme il l’avait déjà fait
pour la Constitution en 2010, lorsqu’il avait exigé à l’époque d’abaisser l’âge
minimum de 40 à 35 ans pour lui permettre de se présenter aux
présidentielles ! Rajoelina ira-t-il au bout de cette idée en prenant la
responsabilité de convoquer une session extraordinaire du parlement à quelques
semaines de la fin de son mandat ?
Certes, dans le cas où Rajoelina garderait la nationalité
malagasy, nonobstant l’article 42 du code de nationalité, il pourra se porter
formellement candidat. Oui, formellement mais sa candidature serait-elle
légitime ?
Dans ce cas, les présidentielles risquent de se transformer en une sorte de
référendum : Pour ou contre la possibilité pour un Multinational de se
présenter.
En effet, le problème fondamental de Rajoelina Métisse est moins de savoir s’il
est toujours malagasy ou pas, mais plutôt qu’il est bien français, avec les
conflits d’intérêts évidents que cela induit, pour ne parler que du différend
sur les îles éparses. Avoir un franco-malagasy comme chef suprême de l’armée
passerait-il comme une lettre à la poste par tous nos militaires ?
A notre avis, ce n’est pas le code de nationalité qu’il faudrait retoucher, ce
serait plutôt l’article 46 de la Constitution. Il faudrait interdire purement
et simplement la candidature des Multinationaux.
Si on complétait ainsi cet article 46 de la Constitution,
Rajoelina est-il prêt à renoncer à sa nationalité française pour pouvoir se
représenter ?
C’est le moins qu’il puisse faire pour qu’on puisse le croire quant à l’amour
qu’il prétend déclarer à Madagascar.
En parlera-t-il dimanche 16 juillet, ou serait-ce une fois de plus un show avec
de nouveaux velirano sans queue ni tête ?
Demain sera un autre jour !
Par : RAMAHIRATRA
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