Affaire des Boeing 777 : Le Scandale Explosif qui Refuse de S'Éteindre – Une Enquête Toujours Ouverte qui Menace Madagascar



Résumons les faits …

L'affaire débute en janvier 2025, lorsque l'Aviation Civile de Madagascar (ACM) délivre un Certificat d'Immatriculation Provisoire (CIP) à la société UDAAN Aviation, basée en Inde, pour cinq Boeing 777-200ER anciennement exploités par des compagnies comme Singapore Airlines et NokScoot. Ces appareils, identifiés sous les immatriculations 5R-RIS, 5R-ISA, 5R-HER, 5R-IJA et 5R-RIJ, étaient censés être convoyés vers un centre de maintenance au Kenya, avec une obligation d'inspection physique à Madagascar – une étape qui n'a jamais eu lieu. Stockés initialement en Chine, les avions transitent par le Cambodge avant d'atterrir en Iran le 15 juillet 2025, intégrant la flotte de Mahan Air, une compagnie iranienne sous sanctions américaines depuis 2011 pour son rôle présumé dans le transport d'armes et de troupes.

Le pot aux roses est découvert le 22 juillet 2025 par le Journal de l'Aviation, alertant sur cette opération de contournement des sanctions occidentales. Les autorités cambodgiennes avaient déjà signalé des documents suspects le 20 juin 2025, révélant des falsifications : la validité du CIP avait été étendue illégalement jusqu'au 12 juillet sans autorisation de l'ACM. Les avions, déclarés "apatrides" par Madagascar après l'expiration de leurs certificats le 17 avril 2025, ont ainsi violé les conventions internationales de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI).

L'enquête malgache, lancée dans la foulée, culmine avec l'arrestation de 22 personnes en août 2025, dont des hauts responsables de l'ACM comme le directeur général, le colonel Gervais Damasy, et des intermédiaires d'UDAAN, notamment l'Indien Singh Khushwinder et le Malgache Heriniaina Rijasoa Andriamananarivo. Les charges incluent corruption, faux en écriture publique, association de malfaiteurs, blanchiment d'argent et mise en danger de la sécurité de l'État. Au total, 33 individus et entités sont impliqués, avec 11 suspects encore en fuite. L'ancien ministre des Transports, Valéry Ramonjavelo, limogé le 29 juillet, fait l'objet d'une procédure distincte devant la Haute Cour de Justice.

Comment un Tel Scandale a-t-il Pu Se Produire ?

Plongeons dans les rouages de cette opération, qui révèle un système vulnérable aux manipulations. Les transactions aériennes internationales, régies par l'OACI et les autorités nationales, impliquent plusieurs acteurs : le vendeur (ici, des entités liées aux anciens exploitants asiatiques), l'acheteur final (Mahan Air, masqué derrière des intermédiaires), des sociétés-écrans comme UDAAN Potentials Ltd – une entité malgache enregistrée en 2023 avec un capital ridicule de moins de 400 euros, officiellement dans l'export de cacahuètes et d'épices, mais opportunément étendue à l'aviation.

Le processus standard pour une immatriculation provisoire exige une demande formelle, une vérification documentaire, une inspection physique de l'appareil, et des validations croisées avec des organismes internationaux pour éviter les violations de sanctions. À Madagascar, l'ACM est censée superviser cela, avec des inspecteurs dépêchés – ici, deux ont vérifié les avions en Chine, mais sans alerter sur les anomalies. Les circuits de validation incluent des codes transpondeurs pour le suivi en vol, qui ont été transmis illégalement, facilitant le transfert vers l'Iran.

Comment personne n'a-t-il su avant l'explosion médiatique ? La réponse réside dans un mélange de négligence et de corruption. Les documents falsifiés – extensions de validité non autorisées – ont circulé sans déclencher d'alertes internes, malgré les signaux cambodgiens en juin. L'absence d'inspection à Madagascar et le transit via des pays comme la Chine et le Cambodge (connus pour leurs contrôles laxistes) ont permis l'opacité. Est-ce facile ? Pas en théorie : les sanctions américaines (depuis 2018 pour les Boeing vers l'Iran) imposent des surveillances rigoureuses via l'OFAC (Office of Foreign Assets Control). Mais avec des pots-de-vin – estimés à des millions dans ce cas, vu le prix des appareils (environ 50-100 millions de dollars chacun) – et des sociétés-écrans, cela devient alarmant de simplicité. Cette affaire illustre comment des nations en développement, avec des institutions sous-financées, deviennent des maillons faibles pour les réseaux d'évasion de sanctions, souvent orchestrés par des acteurs iraniens rompus à ces tactiques.

Le Laxisme Gouvernemental : Une Faillite Systémique Mise en Lumière par le Premier Ministre

Le gouvernement malgache porte une responsabilité écrasante dans ce fiasco. L'ACM, sous tutelle du ministère des Transports, a octroyé ces immatriculations sans vérifications approfondies, ignorant les obligations internationales. Ce laxisme est patent : pourquoi une société comme UDAAN, sans antécédents aéronautiques solides, a-t-elle obtenu un CIP sans escale physique à Madagascar ? Les confessions des suspects indiquent des complicités internes, mais l'absence de surveillance hiérarchique – du ministre au président Andry Rajoelina – est accablante.

Pire, l'annonce du Premier ministre Christian Ntsay, lors de la passation de pouvoir le 29 juillet 2025, révèle une déconnexion alarmante : "Ni moi ni le Président n'étions informés", a-t-il déclaré, qualifiant l'affaire de "scam" par des opérateurs malveillants promettant une connectivité aérienne accrue. Cette déclaration, loin de rassurer, souligne un vide de gouvernance : comment un ministère peut-il ignorer une transaction impliquant des appareils stratégiques ? Ntsay a certes sollicité l'aide du FBI et d'Interpol, mais trop tard, après le limogeage de Ramonjavelo. Ce laxisme institutionnel, dans un pays gangrené par la corruption (Madagascar est classé 145e sur 180 à l'indice de Transparency International), transforme l'île en plaque tournante potentielle pour des trafics illicites, au détriment de sa souveraineté.

Un Scénario Ficelé de Corruption et de Géopolitique

En janvier 2025, des intermédiaires iraniens, via des contacts en Inde et en Chine, identifient UDAAN comme façade idéale. Corrompant des officials de l'ACM avec des sommes substantielles (peut-être blanchies via les activités "agricoles" d'UDAAN Potentials), ils obtiennent le CIP sans inspection. Les avions, stockés en Chine, sont "légitimés" pour un vol vers le Cambodge, où des faux prolongent la validité. Le 15 juillet, ils atterrissent en Iran, renforçant la flotte de Mahan Air pour des usages civils... ou militaires déguisés, comme le transport de missiles vers des proxies au Moyen-Orient.

Les implications ? Une cascade : blanchiment d'argent via des commissions occultes, impliquant potentiellement des élites malgaches pour financer des campagnes électorales. Si prouvé, cela pourrait révéler un réseau plus vaste, avec Madagascar servant de "registre fantôme" pour d'autres sanctions (Russie, Corée du Nord). Le scénario culmine avec une enquête OACI confirmant la complicité, menant à des sanctions internes : chute du gouvernement Rajoelina, instabilité politique, et une économie déjà précaire (47% de tarifs US sur les exports depuis avril 2025) poussée au bord du gouffre.

Les Risques Diplomatiques : Madagascar au Bord de l'Isolation

Les retombées diplomatiques sont gravissimes. En aidant – même involontairement – l'Iran à contourner les sanctions US (interdisant les Boeing depuis 2018), Madagascar s'expose à des représailles : exclusion définitive de l'AGOA (expirant en septembre 2025), qui soutient 400 000 emplois dans le textile et les mines. Les États-Unis, déjà tendus avec l'île sur des questions commerciales, pourraient imposer des sanctions secondaires via l'OFAC, gelant des actifs et isolant financièrement le pays.

Sur la scène africaine, cela entache la crédibilité de Madagascar au sein de l'Union Africaine, favorisant des alliances douteuses avec l'Iran (déjà renforcées par des visites officielles). L'Europe et l'OACI pourraient suspendre des certifications aériennes, paralysant le tourisme et les exports. Dans un monde polarisé, ce scandale risque de transformer Madagascar en paria, amplifiant la pauvreté et les tensions internes, avec des conséquences incalculables pour sa population. Cette affaire n'est pas un incident isolé ; c'est un avertissement sinistre sur les dangers d'une gouvernance défaillante, et tant qu'elle reste ouverte, le péril grandit.

Par : RAMAHIRATRA

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